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Pénaliste formée auprès d’Hervé
Temime, Julia Minkowski revendique une défense exigeante
et mesurée. Entre pédagogie
et stratégie, elle rappelle que
la meilleure réplique médiatique
est souvent le silence, au service
d’un principe cardinal : la présomption d’innocence.
昀氀amboyante et brillante, un charisme exceptionnel, mais aussi une rigueur absolue. Avec lui, pas
de baratin ni d’éloquence pour l’éloquence : la
parole devait toujours servir l’argumentation et la
conviction. Et puis il avait de l’humour, ce qui est
essentiel. J’insiste beaucoup là-dessus avec mes
équipes : nous devons être sérieux, mais ne jamais
nous prendre au sérieux. C’est la pire des attitudes.
Sourire, gentillesse et disponibilité complètent sa pratique où
rigueur et humanité vont de pair.
Oui, incontestablement. Mon grand-père paternel
était pédiatre, l’un des fondateurs de la néonatologie en France. C’était un homme très engagé dans
la société, de cette génération de professionnels
qui, au-delà de leur métier, gardaient un lien fort
avec la ré昀氀exion intellectuelle et l’action citoyenne.
Mes grands-parents maternels, eux, étaient psychiatres, proches des personnes mises au banc.
Tout cela m’a transmis l’idée qu’il faut s’occuper des
autres, des plus vulnérables, et qu’on ne peut pas
être avocat sans passion ni engagement.
Avez-vous subi une in昀氀uence familiale dans votre
parcours ?
Sandrine Jacquemin : Quand on regarde votre
parcours, vous ne sembliez pas prédestinée
au droit. Pourquoi avoir choisi cette voie ?
Julia Minkowski : J’ai toujours voulu être avocate, depuis l’âge de huit ans. C’est vraiment la
littérature judiciaire et les 昀椀lms qui m’ont donné
cet élan. Pour moi, suivre des études de droit
allait de soi, avec cette idée 昀椀xe d’être avocate.
Longtemps, je me suis dit qu’être avocate, c’était
forcément être pénaliste.
Les avocats sont de plus en plus exposés médiatiquement. Quels sont les dé昀椀s ?
Quand on est pénaliste, c’est devenu notre quotidien. Les médias s’intéressent énormément aux
affaires pénales, qu’il s’agisse de faits divers ou de
dossiers impliquant des personnalités. En travaillant avec des communicants, on a appris certains
principes, mais ce n’est pas une science exacte.
Durant mes études, j’ai suivi la logique de l’excellence — j’avais fait ma scolarité à Henri IV, et cela
pousse à toujours viser haut. J’ai intégré Sciences
Po puis je suis allée à Columbia. Et à une époque
où les fusions-acquisitions étaient à la mode, mes
stages m’ont vite montré que ce n’était pas pour
moi. Alors, pour mon dernier stage, j’ai choisi le
pénal, mon rêve depuis toujours. Et c’est là que j’ai
rencontré Hervé Témime. Ça a été une révélation.
J’ai tout de suite su que j’étais à ma place.
La di昀케culté, c’est de sortir de sa posture d’avocat
pour comprendre la perception du public.
Le public n’a jamais accès aux détails du dossier,
tandis que nous sommes contraints par le secret.
Cela crée un déséquilibre. Très souvent, la meilleure stratégie est le silence. Mais tout dépend
du dossier : il faut s’adapter.
Qu’est-ce qu’Hervé Temime vous a transmis ?
Vous êtes très attachée à la présomption d’innocence. Comment la défendre aujourd’hui, face aux
médias et aux réseaux sociaux ?
Professionnellement, à peu près tout. Pour moi,
Hervé Temime incarnait l’avocat : une personnalité
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