Lexmag Numéro 6 spécial été - Magazine - Page 15
appelait à l’époque… « le développement personnel
et professionnel ». Aujourd’hui on dirait soft skills,
mais le terme n’existait pas encore.
Ancienne directrice
pédagogique, passionnée
par les soft skills bien avant
que le mot n’existe, Laure
Bertrand a consacré sa
carrière à placer l’humain au
cœur des apprentissages. De
la formation des dirigeants à
l’accompagnement des jeunes
ingénieurs, elle a vu naître les
enjeux qui agitent aujourd’hui
les juristes : comment rester
humain dans un monde
augmenté par l’intelligence
arti昀椀cielle ? Dans cet échange
chaleureux, elle partage son
regard lucide sur la mutation
en cours, et plaide pour une
IA bien comprise, guidée par
le discernement, l’intelligence
collective et une solide
connaissance de soi.
Cette structure venait d’être créée par JeanLouis Servan-Schreiber, grand patron de
presse, un visionnaire très inspiré des ÉtatsUnis et des travaux de l’école de Palo Alto. Il
voulait proposer aux dirigeants d’entreprise de
nouvelles formations autour du leadership, de
la communication, de la gestion du temps, de la
créativité… Ce sont des sujets qui m’ont tout de
suite passionnée. Et quand on m’a présenté le
poste, je me suis dit : « C’est pour moi ».
Vous êtes donc arrivée dans un univers assez
pionnier à l’époque ?
Oui, la structure existait à peine depuis un an.
Il y avait déjà des consultants chevronnés, qui
construisaient de nouveaux programmes. Moi,
en tant que jeune diplômée, je les ai rejoints et
j’ai découvert un univers passionnant, celui de
la formation aux compétences humaines. Et ce
qui m’a tout de suite parlé, c’est que ça mettait la
connaissance de soi au cœur de la ré昀氀exion. Ce
n’était pas juste une compétence professionnelle :
c’était une manière de grandir, en se comprenant
mieux soi-même.
Et vous avez gardé ce 昀椀l rouge toute votre
carrière ?
Sandrine Jacquemin : Dans votre parcours,
ce qui frappe, c’est la place que vous avez donnée
à l’humain. Qu’est-ce qui vous y a menée ?
Absolument. Même en évoluant dans d’autres
fonctions de management dans l’enseignement
supérieur, puis en devenant enseignantechercheure, ce sont toujours ces thématiques qui
m’ont portée. Jusqu’à créer, il y a 10 ans, une grande
direction pédagogique dédiée, que j’ai quittée 昀椀n
2024, au moment de prendre ma retraite.
Laure Bertrand : Je crois que ça a commencé très
tôt. C’est vraiment lié à mes motivations profondes.
À la sortie de ma grande école de management, je
m’apprêtais à suivre une voie toute tracée dans un
grand groupe. Et au moment de signer, je me suis
demandé : « Est-ce vraiment ce que je veux ? ».
J’ai tout repris à zéro, et j’ai répondu à une annonce
un peu atypique, pour un poste dans une nouvelle
structure de formation centrée sur ce qu’on
Donc oui, les soft skills, les compétences humaines
et comportementales, les capacités sociocognitives, ont vraiment été le premier pilier de
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