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Emmanuel Pierrat fait débat.
Habitué des grands dossiers, des
journaux et des plateaux, Emmanuel Pierrat assume la médiatisation lorsqu’elle sert la défense.
Il trace la frontière entre communication et publicité, défend
la pédagogie du droit et rappelle
que l’exposition, bien dosée, fait
partie du jeu… et de la stratégie. Disponible, réactif, honnête
tout au long de nos échanges, il
revient sans concession sur ses
choix de défendre des dossiers
controversés, mais aussi sur la
période de sa suspension.
L’envie a -t-elle été également alimentée par des
personnalités, des ténors que vous avez vus et
entendus dans les médias ?
Oui, bien sûr. Je suis né en 1968. Donc j’ai décidé
de devenir avocat quand on était au début des
années 80. Ça correspond, par exemple, à la réapparition de Jacques Vergès, qui, d’un seul coup, après
avoir disparu, revient au barreau à la 昀椀n des années
70. Pour moi, ça a été un marqueur important. C’est
à lui que j’ai envoyé ma première demande de stage,
quand j’avais seize ans.
Parmi d’autres personnalités qui comptent aussi
pour moi, il y a Maurice Garçon, disparu moins d’un
an sans doute avant ma naissance, qui a été un
immense plaideur, membre de l’Académie française.
J’ai accroché aux les murs de mon bureau le portrait
d’Henri Leclerc également, sur lequel je 昀椀gure à
ses côtés. Quand je venais de prêter serment, nous
avons été interviewés ensemble, de façon croisée,
sur la liberté d’expression. Il a été, par la suite, un
remarquable contradicteur et est devenu un ami.
Je pourrais en citer bien d’autres à qui j’ai rendu
hommage dans mon livre « Quand les avocats font
l’histoire, de l’Antiquité à nos jours » qui est une
histoire du barreau.
Sandrine Jacquemin : Pourquoi et comment êtesvous arrivé au droit ?
Emmanuel Pierrat : Je suis né dans une banlieue, en
Seine–Saint-Denis, à Pantin, au sein d’une famille où
il n’y avait pas de juristes et où personne n’avait d’ailleurs suivi d’études. Et sur les murs de cette ville, les
noms de rues a昀케chaient des titres tels que « avocat
et président du conseil », « avocat et écrivain », etc.
Et l’exposition publique vous a attiré immédiatement ? Après tout, on peut être avocat et rester
dans l’ombre.
Il y avait toute l’histoire de la Troisième République
qui dé昀椀lait avec le mot avocat. Je trouvais formidables tous ces gens qui avaient été avocats et
autre chose en plus.
Cette envie de médiatisation, je ne la cache pas.
Et par ailleurs, j’écris des livres. Or, je crois quand
même quand on écrit des livres, on cherche à avoir
des lecteurs, à se faire connaître, à les garder, donc
ça implique de toute façon d’aller au contact avec
les médias ou d’en faire la promotion.
Et puis j’ai découvert ensuite qu’il y avait l’idée de
la défense, de l’art oratoire. Et en昀椀n, j’ai compris
qu’on pouvait embrasser cette profession sans avoir
besoin d’hériter d’une charge ; que c’était accessible ! Donc voilà comment je me suis mis en tête
à quatorze ans de devenir avocat.
J’ai toujours mêlé ces deux activités d’avocat et
écrivain. Il m’arrive d’écrire des livres qui n’ont rien
à voir avec le droit, des romans, des essais ou des
livres sur l’art, mais j’ai quand même écrit quelques
livres de droit, j’ai écrit pas mal de livres sur la
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