Numero 5 Lexmag - Flipbook - Page 36
quarante ans qu’il écoute ! C’est donc un chemin,
pas un processus à mettre en place.
Et pas : « Fais ça, puis ça. » Il faut redonner du
pouvoir d’agir à l’autre.
Pour revenir à ta question, les signaux d’alerte sont
nombreux : épuisement, nombreux départs dans
l’équipe, perte de performance, perte de con昀椀ance,
etc., n’importe quelle forme de malaise au travail est
un signal.
Ce que tu décris rejoint ce qu’on entend beaucoup
autour de la communication non violente : l’écoute
active, l’empathie…
Mais quand il faut agir, qu’est-ce qui peut aider ?
Il y a des outils de prise de conscience : des
feedbacks, des 360, des outils comme la Process
Com… Tout ça aide à mieux se voir faire. Mais on ne
peut pas se remettre en question si on est épuisé.
Toute prise de conscience est précédée par une
prise de con昀椀ance.
C’est fort.
Oui. Il faut qu’il y ait quelqu’un, ou un environnement,
qui te donne de l’énergie, qui croit en toi. Sinon,
tu restes en mode défensif et tu ne peux pas te
remettre en question.
Quand le niveau d’énergie est bas, on voit par
exemple souvent se mettre en place chez les
managers des postures de **sauveur**, voire de
**pompier pyromane**.
C’est quoi, ce « pompier pyromane » ? Je veux
l’entendre ! (rires)
Complètement. La CNV, c’est un outil très
intéressant pour développer son management.
L’idée, c’est vraiment d’accuser réception de ce
que dit l’autre, de comprendre l’émotion derrière.
L’écoute, ce n’est pas juste « entendre ». C’est
faire l’effort de rentrer dans le monde émotionnel
de l’autre.
La CNV, c’est aussi aller chercher les faits. Et comme
monsieur Jourdain, beaucoup le font sans le savoir :
quand on évalue la performance de quelqu’un,
c’est plutôt mieux de se baser sur des faits et des
observations, non ?
Et en pratique, ça donne quoi ? Comment on évite
que ça devienne juste un « bravo » de façade ?
Le piège, c’est la démagogie : dire « super, génial »
sans substance. À la place, tu peux demander :
« Comment ça s’est passé ? », « Qu’est-ce qui a été
compliqué ? », « Comment vous avez fait ? » Et là, tu
écoutes. Et tu nommes ce que tu entends : « Je vois
que vous avez fait preuve de persévérance. »
Tu n’as même plus besoin de te mettre en avant.
C’est le manager qui passe son temps à éteindre les
feux, à aider tout le monde… Mais qui, en fait, crée
de la dépendance, parce qu’il ne laisse personne
monter en autonomie. Il sauve, sauve, sauve…
mais il ne responsabilise pas. Donc les problèmes
demeurent. Et du coup, il 昀椀nit épuisé.
Donc on valorise… sans 昀氀atter. C’est plus puissant.
Et il devient indispensable… à un système qu’il a
lui-même verrouillé.
Toujours. J’en parle très tôt. Et je dis : « Moi, je vous
donne des outils. Si vous les utilisez pour manipuler
ou pour manager… c’est vous qui décidez. »
Exactement. Le rôle du manager, ce n’est pas de dire
à l’autre ce qu’il doit faire. C’est de l’aider à trouver
ses propres solutions. Par exemple : « C’est quoi ton
problème ? De quoi tu aurais besoin ? »
Exactement. Et c’est là qu’on fait la différence entre
management et manipulation.
Tu fais cette distinction clairement dans tes
formations ?
La différence se fait au niveau de l’intention, pas au
niveau de la technique. C’est à chacun, à l’aune de sa
conscience, de savoir s’il manage ou manipule ou s’il
est managé ou manipulé.
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