Lexmag Numéro 6 spécial été - Magazine - Page 61
Sandrine Jacquemin : Vous êtes professeur,
avocat, arbitre. Le droit, vous êtes tombé
dans la marmite petit ?
Professeur agrégé de droit
privé à l’Université de Paris I
Panthéon Sorbonne, avocat,
arbitre, Philippe StoffelMunck a façonné sa carrière
au croisement du droit, de la
pensée et de la transmission.
Dans cet entretien, il revient
sur son parcours, les
昀椀gures qui l’inspirent, son
attachement à la clarté du
raisonnement, à la précision
des mots, à la profondeur du
doute méthodique. Avec une
sensibilité discrète, il évoque
aussi ce que l’enseignement lui
apporte, la force de certaines
lectures, la musique qui
l’accompagne parfois, et cette
conviction : dans un monde
qui change, ce ne sont pas les
réponses qui comptent, mais
les bonnes questions… que
nous avons formulées, autant
que possible, avec rigueur et
curiosité.
Philippe Stoffel-Munck : Alors non, pas du tout,
en fait. Je ne suis pas d’une famille de juristes.
Même éloignée. C’est à la faculté de droit que j’ai
progressivement découvert l’intérêt de la chose
juridique. J’étais d’abord parti pour être avocat,
car j’aimais le côté pugnace attaché à cette
profession, et l’être à l’international, par goût du
large. J’ai ensuite découvert, en troisième cycle,
la profondeur de la chose juridique grâce à des
maîtres qui ont su orienter mes lectures. Un jalon
a été « Le 昀氀exible droit » de Jean Carbonnier, un
ouvrage dont je recommande la lecture à chacun
tant il montre, avec ce style unique, combien le
droit s’enracine dans les choses la vie et dans la
civilisation.
Donc il y a eu ce livre, et peut-être aussi des
rencontres ? Des professeurs qui vont ont
accompagné ?
Il y a eu des rencontres avec des professeurs, ça
oui. La faculté de droit d’Aix-en-Provence était un
milieu d’une richesse intellectuelle extraordinaire.
Des professeurs comme Christian Atias ou Alain
Sériaux en droit civil, Jacques Garello en économie.
Ils m’ont orienté et m’ont fait découvrir des auteurs
cardinaux, en droit mais aussi ailleurs. Il y en a
quatre, sans doute, qui m’ont marqué entre 20 et
25 ans. Ça a été Friedrich Hayek, à travers « Droit,
législation et liberté » qui m’a fait comprendre
l’importance de ce qu’il appelait « les règles de
juste conduite » dans la dynamique sociale et
le contraste entre société ouverte et société
fermée. Michel Villey, plus tardivement, qui m’a
montré l’importance de la dialectique, l’intérêt
de la casuistique et les insu昀케sances d’une vision
platement positiviste du droit. Et puis, je l’ai déjà
cité, Jean Carbonnier, et aussi Philippe Malaurie,
pour la profondeur, l’enracinement de la pensée, le
style aussi, presque poétique parfois, qui permet
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