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en 1998 : le communiqué préparé « au mot
près » et lu devant les journalistes a permis
de « cadrer les aveux » et d’imposer un
récit plutôt que de subir celui des médias.
Communiquer, c’est choisir d’agir plutôt que
de réagir, c’est prévenir plutôt que guérir.
Les magistrats, notamment procureurs,
en savent quelque chose : leur parole en
conférence de presse est disséquée et peut
marquer l’opinion bien au-delà de l’enquête.
5. Le procès médiatique parallèle
Deux procès coexistent :
– celui du tribunal, où les juges exécutent la loi
– et celui des médias, où les avocats
défendent leur client et mettent parfois en
scène leur défense ou accusation.
Il peut y avoir une distorsion évidente de
l’exposition de l’affaire : une reconstruction
déformée du procès, alimentant une vision
fausse. Le rôle du magistrat n’est pas en
reste : l’exemple du procureur dans l’affaire
Jonathan Daval montre les risques d’une
communication trop détaillée, susceptible
d’alimenter l’emballement médiatique et de
brouiller l’avancée de l’enquête.
6. Le pouvoir (et le danger) de la
petite phrase
7. Avocats et journalistes :
entre mé昀椀ance et alliance
La relation est ambiguë. Les intérêts
divergent : le journaliste cherche
l’information, l’avocat défend son client.
Certains posent clairement la règle : « Je ne
vous réponds que si vous m’apportez quelque
chose. » Pourtant, des alliances existent, au
service d’une cause commune : recherche
de la vérité, défense d’un présumé innocent,
éveil de l’opinion.
8. L’ego et le besoin de la lumière :
un peu mais pas trop
Pour certains avocats pénalistes, la parole
publique n’est pas seulement un outil de
défense : elle est aussi un spectacle. Plaider
dans les médias fait partie de la stratégie,
mais nourrit également un besoin de
reconnaissance et de visibilité. Être vu, être
entendu, marquer l’opinion… cela contribue à
renforcer l’image de l’avocat, parfois jusqu’à
une forme de « stari昀椀cation » auprès du
grand public. Entre e昀케cacité médiatique
et construction d’une légende personnelle,
la frontière est ténue. Pour les magistrats,
l’exposition est d’une autre nature : ils
incarnent l’institution et doivent résister à la
tentation de personnaliser leur fonction.
L’exemple de Maître Jacques Vergès dans
l’affaire Omar Raddad illustre le pouvoir
explosif d’une phrase choc lancée devant les
caméras. Elle peut orienter l’opinion et peser,
indirectement, sur la suite judiciaire. Mais
tous ne partageaient pas cette approche :
Maître Henri Leclerc, par exemple, prônait
une parole plus sobre, centrée sur les droits
de l’homme. Les magistrats composent avec
un risque inverse : une phrase maladroite,
même neutre, peut être perçue comme
une prise de position prématurée.
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