LexMag 7 - Magazine - Page 87
Tout dépend du contexte. Pour une véritable expertise — un avocat qui répond à un directeur juridique,
par exemple — simpli昀椀er à outrance est risqué : on
rate des détails, on omet des nuances, le destinataire imagine que la question est plus simple qu’elle
ne l’est. En revanche, pour un premier niveau d’information, la simpli昀椀cation est utile. Regardez les
昀椀ches pratiques ou les infographies de Lexbase :
c’est de la vulgarisation, oui, mais 昀椀able, synthétique et immédiatement exploitable.
Pour l’avocat, le résultat compte, mais c’est surtout
le raisonnement du juge qui fait l’intérêt d’une décision ; c’est lui qui permet de l’utiliser ensuite dans
la stratégie. Depuis l’open data, on nage dans des
millions de décisions ; la bataille ne se fait plus sur
le quantitatif, mais sur le qualitatif. Avant 2021, on
se contentait d’avoir le plus gros stock ; aujourd’hui
on attend de l’éditeur qu’il fournisse les meilleures
décisions et un tri pertinent. D’où l’importance de
réellement lire les arrêts : si l’on simpli昀椀e trop, on
perd la substance.
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Pour l’avocat, le résultat
compte, mais c’est
surtout le raisonnement
du juge qui fait l’intérêt
d’une décision ; c’est lui
qui permet de l’utiliser
ensuite dans la stratégie.
Depuis l’open data, on
nage dans des millions
de décisions ; la bataille
ne se fait plus sur le
quantitatif, mais sur le
qualitatif.
Si un lecteur lit le chapeau des cent premiers résultats, en retient dix, puis lit intégralement ces dix-là,
c’est e昀케cace. Lire cent décisions de bout en bout
mangerait une grande partie du forfait dossier ;
impossible quand vous avez un budget client de
3 000 € et un taux horaire de 300 €. Les time-sheets
dé昀椀lent !
Donc simpli昀椀er l’accès — oui. Simpli昀椀er le raisonnement — non. Des 昀椀ches pratiques ou des infographies, façon « droit pour les nuls », donnent la
procédure étape par étape ; ensuite, l’éditeur doit
proposer un volet « pour aller plus loin » : vingt jurisprudences, dix études, quinze textes liés. La vulgarisation ouvre la porte, mais l’approfondissement
reste indispensable — et là, l’expertise humaine
reprend la main.
C’est pour ça que moi, rendre le droit lisible, je
trouve ça intelligent. Et contrairement à d’autres,
je ne vois pas l’intérêt de continuer à avoir des
textes illisibles, des jurisprudences de 200 pages
que personne ne lira, etc. Je trouve que c’est très
bien de le simpli昀椀er, mais il ne faut surtout pas se
contenter de ça.
L’IA rend-elle vraiment le droit plus accessible ?
On entend qu’elle simpli昀椀e, qu’elle résume…
Mais jusqu’où est-ce béné昀椀que ?
En tant que documentaliste, j’attendais cette
« révolution » depuis quatre ou cinq ans : on voyait
des milliards investis partout, mais, concrètement,
rien n’arrivait. ChatGPT a joué le rôle de détonateur
— surtout pour les investisseurs —, mais il n’a rien
inventé ; il a surtout fait un énorme coup marketing.
Dans les usages bureautiques, c’est bluffant :
traduction instantanée, réécriture, résumé d’un
document de quarante pages… Là, l’IA est utile.
En revanche, dans les bases juridiques pures, c’est
encore déceptif : aucun système n’est 昀椀able à 100%.
Les éditeurs n’ont ni les moyens ni l’envie de tout
昀椀nancer, donc on reste avec des outils perfectibles.
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